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Profil
psychologique
et scène de crime: dichotomie
types "expressif » et «
instrumental
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C'est dès 1964 que la dichotomie entre agression "expressive" et "instrumentale" apparaît, avec pour objectif dans la première catégorie de faire souffrir la victime et dans la seconde catégorie d'atteindre un objectif supérieur tel que l'acquisition de biens matériels. A l'époque les auteurs décrivaient des événements, des actes. Depuis 1996, plusieurs études ont tenté de mettre en évidence les corrélations existantes entre différents comportements qui co-surviennent durant les actes d'homicides. Pris séparément ou sortis de leur contexte, certains de ces comportements pourraient être interprétés différemment. Mais en les interprétant les uns en relations avec les autres on ne décrit pas seulement les comportements, on en propose une analyse plus fine. Car bien que les concepts "expressif" et "instrumental" aient été largement utilisés, les spécificités de ces deux classes n'avaient jamais été vraiment définies. C'est aussi l'occasion de définir quels comportements "expressifs/instrumentaux" apparaissent pendant l'homicide mais aussi pourquoi ils sont exprimés. En effet, nous verrons plus loin que certaines caractéristiques des antécédents des agresseurs -reflet de stratégies interpersonnelles dans les relations qu'ils ont eu auparavant avec la victime mais aussi de leur expérience criminelle- peuvent aussi être répartis entre "type expressif" ou "type instrumental". |
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Les scènes de crime peuvent
être différenciées en termes de la relation "expressive"
ou "instrumentale" que l'agresseur a à sa victime.
La catégorie "type
expressif"
comprend des comportements centrés sur la
victime en tant que personne ("personnalisation").
La catégorie "type
instrumental" est centrée
sur des comportements en terme de conséquences qu'ils peuvent avoir
pour l'agresseur. Ici la victime est considérée comme un
objet ("dépersonnalisation") ou un obstacle à une motivation
supérieure qui est orientée sur des gains matériel
ou sexuel.
1 - Sur la scène de crime : comportements de type "expressif" La victime subie des blessures (arme blanche ou arme à feu) au torse, à la tête et/ou aux membres. De plus, les agresseurs qui blessent les membres de leur victime peuvent être considérés comme en situation d'assaut frénétique du fait qu'ils continuent à attaquer malgré que la victime utilisent ses mains et ses bras pour se protéger ou se défendre. Le fait d'avoir amené une arme suggère que l'agresseur a anticipé une confrontation avec sa victime et/ou a déjà eu une expérience antérieure de confrontations violentes. Après le crime, l'agresseur déplace généralement le corps et/ou le cache. Tous ses actes suggèrent des comportements centrés sur les besoins de l'agresseur à se séparer à la fois de leur victime et de la scène de leur crime. De même, cela suggère des relations antérieures entre les deux parties. Le fait que l'on trouve peu d'indices sur la scène de crime montre que l'agresseur a ressenti le besoin d'effacer tout ce qui pouvait le relier à sa victime, ce qui indique clairement qu'ils n'étaient pas étrangers l'un à l'autre. Il est moins fréquent que la victime soit empoisonnée, droguée, étouffée ou qu'on lui bande les yeux. Ces comportements sont des voies indirectes de relations à la victime. Bander les yeux permet à l'agresseur de dépersonnaliser physiquement ou psychologiquement la victime afin de pouvoir achever son crime. Etouffer ou droguer/empoisonner sa victime est une voie indirecte de tuer une personne à laquelle on est émotionnellement attachée. Ces "techniques" sont particulièrement utilisées sur des victimes en situation en faiblesse : des enfants ou des personnes âgées. |
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Scène de crime "expressive"
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Considérons au travers du type "expressif" les comportements "déplacer le corps" et "cacher la victime" : pris un à un, ces comportements ont été utilisés pour définir des agresseurs dits "organisés" (selon la classification du FBI). Cependant, lorsque ces comportements sont mis en corrélation avec d'autres comportements survenus dans les mêmes situations, ils co-occurrent avec des comportements "expressifs" et "orientés sur la personne" (de la victime). Déplacer le corps et le cacher sont certes des actes "organisés" mais ils le sont du fait même de la victime impliquée. C'est parce que l'agresseur connaît la victime ou parce qu'il peut y être associé qu'il ressent le besoin de déplacer le corps. C'est bien l'importance de la victime et sa relation à son agresseur qui s'expriment dans les homicides "expressifs".
2 - Sur la scène de crime : les comportements de type "instrumental" Ici l'agresseur utilise la victime pour atteindre un but supérieur tel que le sexe ou l'argent. Dans la majorité des cas, l'agresseur n'est pas préparé à une confrontation interpersonnelle, aussi la victime est agressée manuellement (étranglement, coups de poings, coups de pieds) et/ou l'arme utilisée a été trouvée sur la scène de crime. Lorsque des biens sont volés, ce sont des objets de valeur. Cela peut indiquer que l'agresseur a décidé de voler sa victime après l'avoir tué, et ainsi il "tourne" le crime en un événement profitable. L'agresseur pouvait avoir aussi un but supérieur à l'homicide tel qu'un cambriolage. Ce qu'on appelle les "cambriolages qui tournent mal"… Scène de crime "instrumentale"
Les comportements peu fréquents dans la scène de crime "instrumentale" sont d'ordre sexuel. Ces comportements suggèrent que l'agresseur ne confère pas à sa victime les qualités de personne avec laquelle il tenterait d'avoir une relation interpersonnelle, mais en tant qu'objet à utiliser pour son profit. Dans certains cas, la victime est retrouvée couverte (couverture). Cela est à distinguer de l'action de cacher le corps en ce qu'il suggère un embryon de honte, impliquant que l'action de tuer ou de violer la victime ne "colle" pas à la perception que l'agresseur a de lui en tant que "voleur". C'est pour la même raison que le criminel met parfois le feu à la scène de crime et/ou au corps. Comme pour certains comportements "expressifs", des comportements du type "instrumental" pris un a un pourraient être interprétés comme relevant du type "expressif". C'est le cas pour les conduites à composantes sexuelles lorsque par exemple l'agresseur viole sa victime. Lorsque ce comportement est corrélé à d'autres actes "instrumentaux", on obtient des comportements de vols (de biens ou de sexe). Bien que la victime soit violée, ce n'est pas la personne réelle qui est visée mais bien une motivation supérieure de gratification -sexuelle dans ce cas. Les caractéristiques des antécédents des agresseurs peuvent de la même façon être classées comme étant de type "expressif" ou "instrumental". En effet, les analyses suggèrent la même dichotomie thématique dans la façon dont les agresseurs entraient antérieurement en relation avec les personnes et les situations. Les caractéristiques comportementales de type "expressif" reflètent la façon dont l'agresseur composait dans ses relations intimes et en cela expriment là aussi combien la relation à la victime est importante. Les comportements de type "instrumental" reflètent ses activités criminelles antérieures mais aussi la façon dont l'agresseur entrait en relation avec les situations et les objets. 3 - Caractéristiques des antécédents de type "expressif" Les caractéristiques qui co-occurrent dans ce thème sont relatives au relationnel et à l'émotionnel. La relation de l'agresseur à sa victime est l'aspect le plus important de ce thème. On y trouve les agresseurs qui ont abusé physiquement/sexuellement de leur partenaire, ceux qui ont agressé leurs proches ou ceux qui présentaient des troubles psychologiques ou psychiatriques.
Dans ce type on retrouve les agresseurs qui composent avec des personnes et des situations qui ont un impact émotionnel sur eux. Il est important pour l'agresseur que sa victime soit une personne réelle et pas juste un corps ou une représentation.
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- Caractéristiques des antécédents de type "instrumental"
Les caractéristiques qui co-occurrent dans ce type sont liées à la fois aux antécédents criminels de l'agresseur (arrestations antérieures pour vol ou cambriolage) et au fait qu'il soit sans emploi. De fait le chômage peut être associé aux crimes avec gains financiers tels que le vol ou le cambriolage. On trouve aussi la variable d'emprisonnement primaire, ainsi que, bien qu'à un moindre degré, les agressions sexuelles. De façon surprenante cette variable co-occurre avec les crimes à gains financiers, ce qui suggère que dans le thème "instrumental" le crime est invasif à la victime, l'agresseur ressentant le besoin d'être "proche" physiquement de sa victime pendant l'agression.
Conclusions De tous les cas étudiés, 55 % présentaient le même type (instrumental ou expressif) à la fois pour les caractéristiques de la scène de crime et des antécédents de l'agresseur. % de cas présentant
le même thème à la fois
Il semble donc que des parallèles puissent être tracés entre la façon dont les agresseurs agissent sur la scène de crime et certaines de leurs caractéristiques, mais comme on peut le constater dans le tableau ci-dessus, ce n'est pas systématiquement le cas. Il est possible que la taille limitée des échantillons pris en considération aient des conséquences sur les résultats. Aujourd'hui encore le profil psychologique a tendance à rester une série d'attributions, de corrélations et de prédictions attribuées à des individus. Nous savons pourtant que c'est une technique complexe qui a aussi besoin d'être testée par des méthodes scientifiques. Or, on ne peut que constater le manque d'études empiriques. Cela tend à masquer un déficit de validité et de fiabilité dans les méthodes habituellement utilisées dans le profil criminel. Les résultats des études que je viens de résumer viennent s'ajouter aux données relatives aux caractéristiques de l’agresseur mais aussi à celles de la victime comme de la scène de crime mises à disposition dans l'élaboration du profil. Des études futures de cette sorte
feront connaître les taux d’erreurs réels/potentiels des profileurs
praticiens et auront des implications pratiques sur le travail des profileurs.
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Copyright Sylvianne Spitzer
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